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Une demande illégale de pièces complémentaires ne fait pas obstacle à la naissance d’une décision tacite d’acceptation !

Par une décision rendue le 9 décembre 2022, le Conseil d’Etat est venu opérer un revirement de jurisprudence important en matière d’instruction des autorisations d’urbanisme.

Les juges ont rappelé que le délai d’instruction n’est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n’est pas exigée par le code de l’urbanisme, et que, dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l’expiration du délai d’instruction, sans qu’une telle demande puisse y faire obstacle.

CE, 9 décembre 2022, n°454521

 

Le Conseil d’Etat vient de rendre un arrêt majeur qui aura immanquablement des répercussions importantes sur l’instruction des autorisations d’urbanisme et la pratique de demandes de pièces complémentaires non exigées par le code de l’urbanisme qui, dans certaines collectivités, était devenue une habitude autant qu’un moyen de gagner du temps sur l’instruction des autorisations d’urbanisme.

 

L’arrêt « Commune d’Asnières-sur-Nouère » ( CE, 9 décembre 2015, n° 390273) par laquelle le Conseil d’Etat avait jugé qu’une demande illégale de pièces complémentaires ne pouvait avoir pour effet de rendre le pétitionnaire titulaire d’une décision implicite favorable, est donc, 7 ans jours pour jours après son prononcé, clairement abandonnée par le nouveau considérant de principe suivant :  

« 5. Il résulte de ces dispositions qu’à l’expiration du délai d’instruction tel qu’il résulte de l’application des dispositions du chapitre III du titre II du livre IV du code de l’urbanisme relatives à l’instruction des déclarations préalables, des demandes de permis de construire, d’aménager ou de démolir, naît une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite. En application de ces dispositions, le délai d’instruction n’est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n’est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l’urbanisme. Dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l’expiration du délai d’instruction, sans qu’une telle demande puisse y faire obstacle. »

 

Suivant les éclairantes conclusions de son Rapporteur public (M. Philippe RANQUET), le Conseil d’Etat a donc clairement jugé, d’une part, qu’il est impossible à l’administration de prolonger l’instruction d’une autorisation d’urbanisme en sollicitant des pièces non exigibles, ce qui était déjà précisé par l’article R. 423-41 du code de l’urbanisme et, d’autre part, qu’une demande illégale de pièces complémentaires ne saurait avoir pour effet de paralyser la naissance d’une décision implicite d’acceptation, ce qui est nouveau.

 

Très concrètement, cette décision favorable aux pétitionnaires et qui va dans le sens de la loi ELAN, va peser sur les services instructeurs qui devront prendre garde à formuler des demandes de pièces complémentaires portant uniquement sur les pièces exigées par le code de l’urbanisme, au risque de voir naître une décision implicite d’acceptation laquelle ne peut être retirée que dans les formes et délais prévus au code de l’urbanisme et au code des relations entre le public et l’administration (3 mois et procédure contradictoire préalable).